Comment se comporter face à un proche alcoolique ou sur le point de le devenir ? Comment lui parler de son problème d’alcool sans le braquer ? Quelles aides existent à La Réunion ? Les 6 choses à savoir !
Un Réunionnais sur 10 boit de l’alcool tous les jours, et notre île est l’une des régions françaises où l’alcool tue le plus. Pour les buveurs mais aussi pour leurs proches, il n’est pas toujours facile de savoir où se situe la limite entre une consommation raisonnable, festive, et une consommation abusive qui risque d’entraîner une dépendance, et peut causer de graves problèmes de santé.
Heureusement, l’addiction à l’alcool n’est pas une fatalité, il existe des moyens pour s’en sortir ! Au sein du couple, au sein de la famille, parmi vos amis : voici 6 réponses-clé pour aider une personne dépendante à l’alcool.
Problèmes d’alcool dans le couple, parmi vos amis ou au sein de la famille ?
Comment savoir si un proche boit trop ?
Il est difficile de se rendre compte de l’addiction d’une personne que l’on aime en se basant uniquement sur son comportement, car les réactions face à l’alcool diffèrent d’une personne à une autre.
En revanche, certains signes peuvent mettre la puce à l’oreille :
- Une consommation de plus en plus régulière
- Un tendance à boire par besoin et non plus seulement par plaisir.
- Un changement d’humeur ou de comportement comme de l’agressivité, de l’anxiété, de la tristesse ou un repli sur soi
- Des modifications du rythme de vie, de l’appétit, du sommeil, de la fréquence de ses sorties
- Des difficultés relationnelles comme des conflits, des ruptures, ou des absences sur le lieu de travail…
- Des conduites à risques qui sont fréquentes sous l’effet de l’alcool (alcool au volant, risque sexuel…)
Par ailleurs, plus on dépasse le seuil des recommandations officielles, plus le risque est important. Ce seuil est le suivant :
- Femmes et hommes : pas plus de 2 verres par jour.
- Pas tous les jours : au moins 2 jours dans la semaine sans consommation.
- Pas plus de 10 verres par semaine.
Lui faire prendre conscience de son problème d’alcool
Il est difficile d’aider quelqu’un qui n’appelle pas à l’aide. Et si cette personne ne voit pas sa consommation comme un problème, elle ne comprendra pas pourquoi on lui demande de changer.
L’idée n’est pas de la forcer à arrêter de boire mais de lui faire prendre conscience que son comportement est un problème pour son entourage et sa santé.
L’aider à prendre soin d’elle/de lui autrement
Notre rapport à l’alcool est très personnel. Certains le voient comme un petit plaisir à partager entre amis, d’autres comme un réconfort pour prendre soin de soi et surmonter ses problèmes. Lorsqu’il est utilisé comme un réconfort, l’alcool peut alors devenir un problème. Pour aider cette personne, proposer lui d’autres manières de prendre soin d’elle. Il peut s’agir d’un moment de détente (massage, yoga), de plaisir gustatif (un plat qu’il/elle affectionne), d’une balade dans la nature : tout ce qui peut lui faire du bien sans avoir recours à l’alcool.
Il faut savoir que le cerveau fonctionne par association. Si à chaque fois qu’une personne se sent mal, elle se tourne vers l’alcool, son cerveau va associer ces deux choses : mal-être = besoin d’alcool. Si dès qu’elle passe un mauvais moment, elle fait quelque chose qui lui fait plaisir (dessiner, jardiner, regarder son film préféré, manger son repas préféré…), son cerveau se souviendra de la possibilité de transformer sa souffrance en plaisir.
Dès qu’elle ressentira des difficultés, elle aura de moins en moins le réflexe de se tourner vers l’alcool.
Partager votre ressenti l’aidera à prendre conscience des conséquences de son comportement.
Sans être dans le reproche, vous pouvez lui parler :
- De son comportement sous influence de l’alcool
- De ses mots sous influence de l’alcool
- Des risques pris sous emprise de l’alcool
- Des activités qu’il/elle ne fait pas ou plus à cause de son alcoolisation
- De ce que vous ne faites pas ou plus ensemble à cause de son alcoolisation
- De ce que vous ressentez quand vous le/la voyez boire
Eviter les reproches et le chantage
Exprimer vos inquiétudes et vos ressentis personnels est une belle façon de montrer que l’autre compte pour vous sans le dévaloriser.
Plutôt que dire « Tu me déçois une nouvelle fois », il sera plus bénéfique de dire « Quand tu bois, j’ai peur pour ta vie, je suis angoissé-e ».
Que ce soit par désespoir ou sous le coup de la colère, faire des reproches et user du chantage — par exemple : “si tu n’arrêtes pas de boire, je n’accepterai plus aucune invitation chez nos amis” — risque de fragiliser la confiance installée entre vous et de bloquer le dialogue.
Par ailleurs, si sa dépendance est sévère, le fait de le menacer le confortera dans l’idée que l’alcool est son seul réconfort.
La meilleure attitude à adopter est d’avancer à son rythme dans sa prise de conscience et dans les efforts qu’il fournit dans le respect et la bienveillance.
Encourager le dialogue et exprimer de l’empathie (je te comprends)
Submergés par l’inquiétude, la peur ou même la colère, nous ne cherchons plus à comprendre les raisons qui poussent nos proches à consommer de l’alcool de manière déraisonnable.
Pourtant, il est essentiel de comprendre les motivations qui les poussent à boire. Ces raisons cachent souvent un mal-être profond : timidité, angoisses, peur d’être rejeté, traumatismes, solitude…
De votre point de vue, sa consommation d’alcool le détruit. De son point de vue, elle l’aide probablement à faire face à des difficultés au quotidien.
Pour l’aider, faites-le parler : pourquoi bois-tu ? Qu’est-ce que l’alcool te fait ressentir ?
S’il ne souhaite pas en parler avec vous, invitez-le à en parler avec des tierces personnes :
- Lignes téléphoniques de soutien
- Médecin traitant
- Consultations en addictologie, etc.
Ces professionnels l’inviteront à faire le point sur ses difficultés sans pour autant immédiatement parler de traitement ou d’abstinence.
Spécialisés dans la prise en charge des problèmes d’addiction, les CSAPA proposent des consultations gratuites et anonymes. À La Réunion, il existe cinq centres de soin spécialisés dans la prise en charge des problèmes d’addiction. Appelés CSAPA, ces centres sont gratuits, anonymes et de proximité > Voir article : ALCOOL, TABAC ET ADDICTIONS À LA RÉUNION : QUI PEUT M’AIDER ?
Ne pas agir à sa place
Votre soutien est primordial pour votre proche mais cela ne signifie en aucun cas que vous devez agir à sa place.
Tout comme vous ne pouvez pas arrêter de boire de l’alcool à sa place, vous ne pouvez pas prendre rendez-vous pour lui contre sa volonté. Il est très important qu’il soit acteur de cette démarche !
Vous pouvez lui faciliter la tâche par d’autres moyens :
- Mettre à sa disposition les numéros d’aide à La Réunion
- Lui proposer de l’accompagner aux rendez-vous
- Vous rendre dans un centre de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie afin de :
- trouver une oreille attentive pour évoquer les difficultés que vous rencontrez dans un lieu confidentiel et sécurisé
- Obtenir de l’information sur les risques liés à la consommation excessive d’alcool,
- Demander conseil aux professionnels de l’addiction sur la meilleure approche à adopter pour aider votre proche
- Expérimenter l’accueil par vous-même afin de pouvoir plus facilement convaincre votre proche de s’y rendre et le guider
Et s’il n’agit pas de lui-même on fait comment ?