Tous les deux jours, un bébé naît avec un Trouble du Spectre de l’Alcoolisation Fœtale (TSAF) à La Réunion. Depuis 2021, l’équipe mobile d’appui TSAF offre à ces enfants une prise en charge et un accompagnement spécifique et sur-mesure.

En 2016, La Fondation Père Favron, a mis place en l’équipe mobile fil d’ARIAAN pour accompagner les femmes enceintes consommatrices d’alcool et leurs enfants (ARIAAN = Agir contre les Risques Inhérents à l’Alcoolisation Anté Natale). Depuis 2021, une seconde équipe a été créée spécifiquement pour accompagner les enfants souffrant d’alcoolisation avant la naissance.

Les deux équipes œuvrent dans le cadre du Centre Ressources TSAF*, dirigé par Bérénice Roy-Doray, Professeure de génétique au CHU de La Réunion.

SAF, TSAF : qu’est-ce que c’est ?

Les TSAF, Troubles du Spectre de l’Alcoolisation Fœtale, regroupent l’ensemble des troubles physiques, mentaux et comportementaux rencontrés chez les personnes ayant été exposées à l’alcool avant leur naissance. On parle ici des personnes dont la mère a consommé de l’alcool au cours de la grossesse mais aussi des personnes dont le père a consommé de l’alcool dans les 3 mois précédant la conception.

Le SAF, Syndrome d’Alcoolisation Fœtale, souvent détectable dès la naissance, est la forme la plus visible de ces troubles. C’est aussi la forme la plus complète puisqu’elle associe des troubles physiques (retards de croissance, malformations physiques, malformations particulières du visage, etc.) et des troubles neurologiques pouvant entraîner un retard dans l’acquisition de la marche, du langage, etc.

Mais « ne parler que de SAF est très réducteur, affirme la Pr Roy-Doray, car cela ne correspond qu’à 1 dixième des enfants que l’on reçoit ».

90 % des enfants n’ont pas de malformations physiques ni de handicap visible, mais sont uniquement porteurs de troubles neuro développementaux. « Ils sont donc souvent repérés plus tard que les enfants atteints du SAF, à travers des troubles moteurs, une maladresse, des problèmes d’équilibre, de motricité fine, de mémorisation, de raisonnement, parfois un déficit mental… Alors que les TSAF sont la cause la plus fréquente de handicap cognitif ! » précise la Directrice du Centre Ressources

Quelles sont les missions de l’équipe mobile d’appui TSAF ?

L’équipe mobile d’appui TSAF offre un accompagnement sur-mesure aux enfants ou futurs enfants de mères consommatrices d’alcool. Elle se compose de deux référentes en lien permanent avec les autres professionnels du Centre Ressources.

Leur mission est d’accompagner les familles avec pour objectif principal le suivi des enfants porteurs de troubles, afin de les aider à mieux vivre.

Qui peut bénéficier de cet accompagnement ?

L’équipe mobile prend en charge les enfants déjà diagnostiqués ainsi que les enfants repérés ou pour lesquels on suspecte des troubles liés à l’alcoolisation fœtale.

« Il n’y a pas d’âge limite ni d’autre prérequis. On accepte tous les enfants. Si on ne peut pas guérir du Syndrome d’Alcoolisation Fœtale, une prise en charge précoce est fondamentale car elle permet une prise en considération de leurs difficultés (mémoire, apprentissage, compréhension orale, contrôle des émotions, etc.). Ainsi, les enfants perdent moins confiance en eux et on peut observer des améliorations au niveau des apprentissages, du comportement, etc. Il n’est jamais trop tard ! » insiste Bérénice Roy-Doray.

Comment se déroule l’accompagnement proposé par l’équipe mobile d’appui TSAF ?

Lorsque l’on contacte le Centre Ressources (voir encadré), l’enfant, selon son lieu d’habitation, son âge et sa situation, est orienté directement vers un médecin du CHU pour diagnostic ou vers l’une des deux référentes de l’équipe mobile.

Les référentes peuvent alors accompagner l’enfant et sa famille de plusieurs manières :

Coordination :

  • elles orientent l’enfant vers des professionnels de proximité : médecin traitant, orthophoniste, Centre d’Action Médico-Sociale, Centre Médico-Psychologique, Plate-forme de Coordination et d’Orientation, Maison départementale, etc.
  • elles font le lien avec eux.

Accompagnement et suivi :

  • elles accompagnent les mamans et les enfants jusqu’à la consultation pour diagnostic au CHU,
  • après la consultation, elles poursuivent et renforcent l’information de la famille pour les inciter à mettre en place une rééducation et une prise en charge globale,
  • elles font le lien avec la famille (et la référente qui accompagne la maman si elle est suivie par le fil d’ARIAAN) : elles peuvent ainsi repérer les frères et sœurs qui pourraient souffrir d’un trouble de l’alcoolisation fœtale, voir l’évolution de la maman, etc.

Pédagogie :

  • elles sensibilisent les enseignants, infirmiers et psychologues scolaires aux troubles et difficultés de l’enfant,
  • elles leur expliquent ce qu’il est possible de mettre en place à l’école en termes de compensation du handicap.

« On essaie toujours de combiner l’ensemble des dispositifs qui existent, précise la Directrice du Centre Ressources. Par exemple, dans le cadre du fil d’ARIAAN, je peux être amenée à suivre une femme enceinte dont on sait qu’elle consomme de l’alcool. Lorsque cette dame va accoucher, je vais essayer de suivre son enfant car je vais le considérer comme vulnérable (dans l’idéal tous les 3 mois pendant la première année, puis deux fois par an pour voir son évolution).

À 5 ans, l’enfant aura son bilan au centre diagnostic du CHU, qui déterminera la forme et le degré d’atteinte de l’enfant mais aussi ses points faibles et points forts.

L’accompagnement proposé se fait au cas par cas, selon la situation de l’enfant, ce qui est déjà mis en place, etc. »

Quelles conditions doivent être réunies pour que cet accompagnement soit efficace ?

« Le plus important est l’information des familles (ou de l’assistante familiale, car 90 % enfants de ces enfants sont placés) et bien sûr leur accord, poursuit la Professeure.

Il est aussi nécessaire que l’ensemble de professionnels qui entourent ces enfants (professionnels de santé mais aussi personnels scolaires, de la Protection Judiciaire de la Jeunesse, de la brigade des mineurs, de la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH), etc.) soient informés. Le Dr Nekaa [Médecin coordonnateur addictologue] et moi-même faisons donc beaucoup de formation sur le sujet.

On peut ainsi faciliter le repérage des enfants souffrant de troubles de l’alcoolisation fœtale et leur offrir une prise en charge plus efficace et plus rapide. »

Contacter l’équipe mobile d’appui TSAF

Vous êtes membre de la famille d’un enfant qui a été diagnostiqué ou qui pourrait être porteur d’un trouble de l’alcoolisation fœtale, vous faites partie de son entourage proche ou lointain (professionnel de santé, de l’éducation, de justice, de l’action sociale, etc.), vous pensez être vous-même concerné par ces troubles ?

Vous pouvez contacter  :

Centre Ressources Troubles du Spectre de l’Alcoolisation Fœtale

16 rue Marius et Ary Leblond – 97450 Saint-Louis

0262 35 72 61

centre.ressources@favron.org

Les chiffres de l’alcoolisation fœtale à La Réunion

  • 2 à 3 enfants sur 100 naissent avec des TSAF, soit 150 nouveau-nés chaque année
  • 1,2 enfant sur 1 000 est atteint d’un SAF, soit 13 à 15 enfants chaque année
  • 66 enfants ont été suivis par le Centre Ressource TSAF depuis 2021, dont 28 en 2023. La majorité est âgée de 2 à 10 ans

*Centre Ressources des Troubles du Spectre de l’Alcoolisation Fœtale, géré par la Fondation Père Favron, majoritairement financé par l’ARS de La Réunion, et également par la MILDECA pour des projets ponctuels.

Tous nos articles sont rédigés avec l’aide de professionnels de santé de La Réunion.