Une trousse ou une armoire à pharmacie qui déborde… de tout un tas de médicaments dont on ne se souvient même pas ? Il est temps de faire le tri avec Sabine Leny, pharmacienne et présidente du Syndicat des pharmaciens de La Réunion !

Les restes de traitements prescrits par le médecin, la trousse de premiers soins, les produits d’automédication… Si l’on n’y prend pas garde, tout cela s’entasse et vient grossir notre armoire à pharmacie, parfois inutilement. Et si on faisait le tri ?

Pourquoi trier son armoire à pharmacie ?

Sabine Leny : Cela sert à faire le point sur les médicaments qui sont périmés, ceux qui peuvent encore être utilisés, sur les produits d’urgence, et permet de se débarrasser des médicaments inutiles.

En faisant un point régulier de sa pharmacie, on sait ce qu’on a déjà et on évite aussi de gaspiller !

Comment trier ? Quels médicaments jeter ?

S. L. : Il faut systématiquement ramener en pharmacie :

  • les médicaments non utilisés : dès qu’un traitement sur ordonnance est terminé, on ramène le produit restant à la pharmacie car il a été prescrit à une personne donnée, à un moment donné et pour une durée donnée,
  • les médicaments dont la date est expirée car les médicaments perdent leur efficacité avec le temps,
  • les médicaments qui ont changé d’aspect : une solution qui a épaissi, des comprimés qui changent de couleur ou de texture, etc.

Par ailleurs, certains médicaments ne sont utilisables que quelques semaines une fois entamés, comme par exemple les sprays, sirops ou collyres. L’astuce est d’inscrire la date d’ouverture sur la boîte ou le flacon pour savoir jusqu’à quand on peut les utiliser !

Et les pansements, compresses ? Les préservatifs ?

S. L. : Concernant les pansements et compresses, tout dépend de l’usage que l’on en a. Certaines compresses conditionnées par deux sont stériles, mais ne le restent pas longtemps une fois l’emballage ouvert. S’il s’agit de soigner une plaie qui nécessite beaucoup de minutie, on utilisera exclusivement des compresses stériles et non périmées. De même, il est important de respecter la date de péremption des compresses imprégnées (de produit antiseptique, cicatrisant ou autre), afin d’être sûr de leur efficacité.

Les préservatifs sont à jeter dès que la date de péremption est dépassée, car le latex s’abîme et son efficacité peut être réduite.

Où me débarrasser de mes médicaments ?

S. L. : Il faut distinguer les médicaments, les compléments alimentaires et les dispositifs médicaux*.

Les médicaments (disponibles avec ou sans ordonnance, mais toujours soumis à une autorisation de mise sur le marché ou AMM) dont on souhaite se débarrasser doivent systématiquement être ramenés dans une pharmacie, où ils sont collectés par l’organisme Cyclamed (voir encadré). On ne jette jamais ses comprimés, sirop, etc. à la poubelle, dans les toilettes ou dans l’évier car leur substance active peut passer dans l’eau et polluer l’environnement ! Le dispositif Cyclamed  concerne uniquement les médicaments non utilisés, à usage humain (et non vétérinaire), périmés ou non, entamés ou non.

Parmi les dispositifs médicaux, les aiguilles, seringues ou bandelettes pour les personnes diabétiques sont toujours délivrées avec une boîte jaune destinée à recevoir les déchets d’activités de soins à risques infectieux (DASRI). Il est important de toujours jeter ces dispositifs usagés dans cette boîte, puis de la ramener à la pharmacie. Elle sera collectée par un organisme qui la détruira en toute sécurité. Ces déchets ne doivent jamais être jetés à la poubelle !

En revanche, les compléments alimentaires (vitamines, phytothérapie, etc., sous toute forme), qui ne sont pas soumis à une AMM, les préservatifs, pansements et compresses périmés, doivent être jetés avec les ordures ménagères, car ils ne sont pas repris en pharmacie.

Enfin, tout ce qui provient de l’hôpital est éliminé par l’hôpital. En cas d’hospitalisation à domicile (HAD) par exemple, c’est la pharmacie à usage interne de l’organisme de HAD qui récupère les médicaments non utilisés.

Si vous avez un doute, le site internet www.cyclamed.org propose un moteur de recherche. Il suffit de taper le nom du produit pour savoir si on peut le ramener en pharmacie ou non.

Comment s’en débarrasser ?

S. L. : On ramène de préférence ses médicaments dans leur contenant d’origine (blister, flacon, spray, tube, etc.), en prenant soin auparavant d’enlever les boîtes et notices, que l’on jette dans la poubelle de tri.

Et la collecte des médicaments non utilisés ou périmés se fait dans toutes les officines de l’île, tout comme la collecte des DASRI.

Donner ses vieux médicaments non utilisés : bonne ou mauvaise idée ?

Qu’ils soient périmés ou non, il peut être tentant de donner ses médicaments non utilisés à une tierce personne ou dans des pays en voie de développement. Mauvaise idée ! « L’utilisation de médicaments est très individuelle, alerte Sabine Leny.

Par exemple, si un antibiotique est mal adapté, la personne qui le reçoit risque de développer une antibiorésistance et si le médicament est périmé, il sera inefficace. Il y a également un risque de mauvais usage du médicament (mauvaise automédication, commerce parallèle, etc.). » Mieux vaut donc laisser des organismes comme Pharmaciens sans frontières gérer l’approvisionnement en médicaments des pays en voie de développement.

Que deviennent les médicaments que je dépose en pharmacie ?

Les médicaments ramenés en pharmacie sont rassemblés dans un carton qui sera géré par Cyclamed, association agréée par l’État qui collecte puis valorise les médicaments non-utilisés (valorisation sous forme d’énergie permettant d’alimenter des foyers français). Aujourd’hui tous les médicaments ramenés dans l’une des 250 pharmacies de La Réunion ou en métropole sont traités par Cyclamed.

Depuis juin 2009, la redistribution des médicaments ramenés en pharmacie aux organismes humanitaires est interdite.

Quelle est l’armoire à pharmacie idéale ?

S. L. : Quatre catégories de produits sont indispensables.

1 – Les produits de premiers secours

Ils sont utiles pour intervenir sur les petits maux, à la suite d’un accident domestique léger (brûlure, chute, coup, etc.) :

  • produit antiseptique,
  • pansements et compresses,
  • tulle gras,
  • pommade contre les bleus,
  • pommade cicatrisante.

2 – Contre la fièvre et la douleur

Contre la fièvre et les douleurs légères à modérées, je recommande un antalgique : le paracétamol. Il est à préférer à l’ibuprofène, qui comporte beaucoup de contre-indications.

3 – Pour le tube digestif

  • Un anti diarrhéique,
  • une aide à la digestion (par exemple citrate de bétaïne),
  • un anti vomitif,
  • un anti spasmodique pour les douleurs abdominales.

4 – Pour les yeux

Il est utile d’avoir à disposition un collyre anti irritation ou du sérum physiologique.

Quelques conseils pour bien ranger son armoire à pharmacie ?

S. L. : On peut déjà organiser son armoire à pharmacie en deux parties : une pour les enfants et une pour les adultes.

Dans chaque partie, on peut classer les produits par catégorie de maux (premiers secours, tube digestif, douleur et fièvre, yeux, etc.).

Il est important de séparer les médicaments sur ordonnance car ils sont prescrits individuellement.

Ces quelques conseils permettent de trouver rapidement ce dont on a besoin dans l’urgence. Il ne faut d’ailleurs pas hésiter à étiqueter son armoire à pharmacie !

Les médicaments sont à conserver à environ 25°C, et à l’abri du soleil. À La Réunion, je conseille de les stocker dans la pièce la plus fraîche de la maison, dans une armoire fermée à clé et en hauteur, qui reste inaccessible aux enfants. Certains médicaments comme les vaccins doivent quant à eux être conservés au réfrigérateur. Dans ce cas, cela est indiqué sur la notice. Si la conservation n’a pas été faite au frigo, il est nécessaire de les ramener en pharmacie.

Enfin, il est important de garder la notice et l’emballage tant que le médicament est utilisable afin de connaître son application, son mode et sa durée de conservation, ses effets indésirables, et de pouvoir renseigner rapidement le SAMU en cas de mauvaise prise. Si on a égaré la notice, on peut appeler son pharmacien pour lui demander des informations, ou la retrouver en ligne sur les sites des laboratoires ou du Vidal.

* « un instrument, un appareil ou un équipement destiné à être utilisé chez l’homme à des fins, notamment, de diagnostic, de prévention, de contrôle d’une maladie ou d’une blessure. L’action principale d’un dispositif médical n’est pas obtenue par des moyens pharmacologique ou immunologique ni par métabolisme, elle est essentiellement mécanique. Un logiciel destiné à être utilisé spécifiquement à des fins diagnostiques ou thérapeutiques constitue également un dispositif médical. ». Définition du Code de la santé publique !

Tous nos articles sont rédigés avec l’aide de professionnels de santé de La Réunion.