308 personnes sont atteintes du Syndrome de Dunnigan en France, dont près de la moitié à La Réunion(1). De quoi s’agit-il ? Quels traitements existent ? Pourquoi est-il si présent sur l’île ? Les réponses avec deux expertes réunionnaises.

Le Professeur Nobécourt est professeur des Universités en nutrition, médecin diabétologue au CHU de La Réunion, référente pour la prise en charge des lipodystrophies à La Réunion, et mène des recherches sur les complications de la lipodystrophie et du diabète. Gaëlle Hoarau Grondin(2), 36 ans, atteinte du Syndrome de Dunnigan et fondatrice de l’association nationale Vaincre Dunnigan, est sa patiente. Toutes deux répondent à nos questions sur la lipodystrophie partielle familiale de type Dunnigan (FPLD2), plus couramment appelée Syndrome de Dunnigan.

Qu’est ce que le syndrome de Dunnigan ?

Professeur Nobécourt : C’est une mutation génétique rare qui entraîne une anomalie de répartition du tissu adipeux sous la peau et une insulino-résistance. Le tissu adipeux sert à stocker l’énergie sous forme de graisse. Chez les personnes porteuses de cette mutation, il n’arrive pas à se maintenir au niveau de la partie basse du corps : il s’atrophie au moment de la puberté. Le corps n’a donc pas d’autre choix que de répartir les graisses ailleurs, c’est-à-dire dans la partie supérieure du corps mais aussi dans les organes ou le gras n’a rien à faire : autour des viscères, dans le foie, dans les muscles, etc.

Si cette pathologie touche indifféremment les deux sexes, elle a souvent plus d’impact chez les femmes, au niveau de l’apparence physique comme des complications.

Une sur-représentation de Dunnigan à La Réunion

On parle d’1 cas de Syndrome de Dunnigan pour 100 000 personnes en Europe mais 1 cas sur 7 000 à La Réunion ! Une sur-représentation qui s’explique par l’histoire du peuplement de notre île qui, du fait d’un faible brassage génétique, aurait « concentré » le gène muté responsable de la maladie.

« Il existe une mutation spécifique, appelée mutation réunionnaise, qui est différente de la mutation classique que l’on trouve en Europe et en métropole, précise le Pr Nobécourt. Les deux portent les mêmes taux de complications et nécessitent des prises en charge actives. A priori cette mutation n’est pas arrivée sur notre île, mais est apparue sur notre île puisqu’on ne la retrouve que chez des Réunionnais. ».

« Oui, tous les Réunionnais atteints du syndrome de Dunnigan descendent des enfants des deux premiers couples installés à la réunion en 1670, François Grondein et Jeanne Arnould, confirme Gaëlle Hoarau Grondin, présidente de l’association Vaincre Dunnigan. On ne sait pas si certains porteurs réunionnais du Syndrome sont apparentés avec des porteurs métropolitains, mais on sait qu’à La Réunion, les 140 personnes atteintes sont apparentées. » Et la présence du patronyme Grondin dans l’arbre généalogique est aujourd’hui un des indices pouvant orienter vers un Syndrome de Dunnigan…

Comment sait-on qu’on est atteint de Dunnigan ? Quels en sont les symptômes ?

Professeur Nobécourt : Même si on est porteur de la maladie dès la naissance, l’atrophie du tissu adipeux ne se déclare qu’à partir de la puberté. Le symptôme le plus visible est le manque de graisse sous la peau, qui donne l’impression que les jambes, les fesses, les bras, l’abdomen sont très musclés. On voit également apparaître les veines.

On peut déjà déceler de petits signes avant la puberté, mais ils sont moins flagrants sur le corps d’un enfant en développement.

Gaëlle Hoarau Grondin : J’avais en revanche une accumulation de graisse au niveau du tronc, du cou, du dos,